Laissons la parole à celles qui nous entourent
- jeunesclubso
- 8 mars 2016
- 4 min de lecture
"Je suis fière d'être une fille"
Et si Séphora avait été un garçon, et si Séphora avait été son frère, et si Séphora avait grandi dans une famille non-musulmane, et si..?
Et si nous les laissions prendre la parole, ces femmes, qui nous entourent?
Et si nous nous intéressions à son parcours, à elle, à ses expériences, à sa vie? Si pour une fois, nous nous intéressions à des filles, qui partagent notre quotidien, nos classes, nos transports en commun, nos vies ? A ce qui fait d’elles ce qu’elles sont, des femmes.
Séphora est une jeune femme de 17 ans, lycéenne en terminale S, dans un lycée de Chalon-sur-Saône. Elle aime Joke, Booba, le rap, et souhaite intégrer une prépa d’école de commerce.. C’est Séphora quoi, une jeune femme comme il en existe près de la moitié de la population mondiale.
Et bien aujourd’hui, c’est Séphora que nous avons voulu mettre en lumière. Nous avons voulu construire ensemble un article qui parlerait d'elle, de ses expériences, de ses opinions, et lui donner l'occasion de s'exprimer en tant que femme sur les femmes et surtout la laisser s'exprimer sur ce qu'elle est.
-« Est-ce que tu es fière d’être une femme ? »
-Oui, bien sûr, je suis contente d’être une fille, je suis fière, parce qu’on a encore du chemin à faire, il faut se battre pour, alors que si j’étais un garçon..Tout est déjà acquis pour eux, il n’y’a presque rien à faire. Donc oui je suis contente d’être une fille. C’est pas une voie de facilité, ils nous restent encore plus d’égalité à avoir. » La facilité. Oui être un garçon c’est facile, c’est avoir la plupart du temps le choix.
Et puis viennent les restrictions..
Séphora m’explique ainsi que quand on est une fille, on se limite soi-même, dans les façons de s’habiller, de se comporter même si oui, il y’a là aussi une part de la personnalité. Et puis viennent les restrictions, qu’elles soient imposées ou choisies, elles sont là, elles existent, et être une fille, pour Séphora, cela ne va pas sans. Que ce soient des lieux que des filles ne doivent pas fréquenter, ou des manières de se comporter, être une fille c’est faire toujours ce que l’on attend de nous. Mais qu’est-ce que l’on attend de nous au juste ? « Dans ma situation, les filles sont l’honneur de la famille […] On nous impose des restrictions, on nous prive un peu de notre liberté, parce qu’on a peur que notre image soit dégradée »
« Je pouvais pas avoir de réseaux sociaux alors que mes frères si, et les autres filles pouvaient. Je n'ai plus le droit de m'habiller court depuis mes 16 ans et demi environ, après comme je te l'ai déjà dit je ne peux pas fréquenter certains endroits et être vue avec des garçons » Toutes ces choses font partie de sa vie, de son vécu de fille.
Et puis il y'a toutes ces injonctions « Soit attirante, sois féminine, sois ceci, sois cela, MAIS PAS TROP » que Séphora entend, voit, écoute, qui sont là et qu'elles expérimentent au quotidien.
Cette différence..
Et puis il y’a cette différence vis-à-vis de ses frères, où elle ne dispose pas de la même liberté et du même rôle. Cette différence vis-à-vis des garçons, où, en tant que femme, elle sera majoritairement inégale. Cette différence vis-à-vis des filles non musulmanes, non issues d’une famille immigrée, où elle n’est pas vue pareille, et où elle n’a pas autant de libertés. Toutes ces différences, qui font que Séphora n'est pas si égale que ça, qu'il y'a toujours quelque chose de différent qui la sépare de ceux qui l'entoure.
Séphora en répondant à l'une de mes questions me dit que ces situations d'inégalités ou de différences concernent la plupart du temps toutes ces choses qui pourrait la rendre attirante, la rendre attirante au près des garçons. Si elle traîne avec un garçon, on lui pose des questions, on insiste pour savoir ce qu'elle faisait là à ce moment-là avec un garçon. Et bien sûr, si elle avait été un de ses frères, personne n'aurait insisté..
Alors j’en viens à lui demander ce qu’elle pense du terme « beurette » (issu de « beur » et où l’on a ajouté le suffixe –ette, qui est un terme très péjoratif). « Ce sont des termes que j'ai déjà utilisé où qu'on a déjà utilisé pour parler de moi mais toujours à la rigolade mais en y réfléchissant c'est super péjoratif parce que c'est une insulte de la femme mais raciale en plus de ça, c'est créateur de préjugé supplémentaire ». Qui a dit que les mots n'étaient pas importants?
En voyant et en écoutant Séphora, il est réellement important de comprendre que chacune des luttes à mener est liée. Une femme, comme Séphora, peut être victime de sexisme et d'inégalités, tout comme être victime de racisme et d'islamophobie. Et tant que nous ne prendrons pas en compte ces multiples parts d'identités qui construisent les humains que nous sommes, nous sommes encore très loin de l'égalité. .

Séphora durant un chantier solidaire au Togo
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